Sommaires exécutifs 28 oct. 2019
Pensez à planifier la réhabilitation des terrains ou la gestion des sols contaminés dans vos projets
La réalisation de projets d’infrastructure ou de développement peut déclencher diverses obligations relatives à la réhabilitation des terrains et à la gestion des sols contaminés. Une planification en amont est clé afin de limiter le risque de mauvaises surprises en cours de projet et d’assurer le succès de celui-ci.[1]
Le régime juridique applicable à la contamination et à la réhabilitation des terrains se trouve essentiellement à la Loi sur la qualité de l’environnement (« LQE ») et ses règlements d’application, dont le Règlement sur la protection et la réhabilitation des terrains contaminés (« RPRT »).
Ce régime prévoit certaines obligations spécifiques en matière de caractérisation et de réhabilitation des terrains supportant ou ayant supporté des activités « désignées ». Le RPRT identifie notamment les catégories d’activités industrielles ou commerciales « désignées » et fixe les valeurs limites réglementaires applicables lesquelles sont conçues en fonction du zonage applicable au terrain.
Obligations statutaires de caractérisation et de réhabilitation
Les cas donnant ouverture aux obligations statutaires de caractérisation et de réhabilitation du terrain sont les suivants :
Cessation d’une activité « désignée »
Lors de la cessation définitive d’une activité « désignée », une étude de caractérisation obligatoire doit être réalisée dans les six mois de la cessation. Un délai supplémentaire peut être obtenu dans certains cas. Si cette étude révèle la présence de contaminants au-delà des normes réglementaires applicables, un plan de réhabilitation devra être préparé, approuvé par le ministre et exécuté. De plus, un avis de contamination devra être inscrit au registre foncier. Une fois la réhabilitation du terrain effectuée, un avis de décontamination pourra alors être inscrit.
Ainsi dans le cadre d’un projet de revitalisation ou de développement impliquant, par exemple, la fermeture d’une usine dont les activités sont désignées au RPRT, ces obligations seront déclenchées et incomberont à l’entreprise cessant lesdites activités, et ce, peu importe son statut de locataire ou de propriétaire du terrain en cause. L’exécution des études et des travaux de réhabilitation pourra, dans un tel cas d’espèce, faire l’objet de négociations contractuelles avec l’entreprise souhaitant acquérir le terrain ou procéder à sa revitalisation, mais en vertu de la LQE, c’est l’entreprise cessant ses activités qui demeurera malgré tout responsable.
Changement d’usage
La réalisation d’un projet de développement ou d’infrastructure impliquant un changement d’usage sur un terrain sur lequel des activités « désignées » ont été exercées par le passé déclenche également pour celui qui a l’intention de changer l’utilisation de ce terrain (même s’il n’en est pas propriétaire), l’obligation de réaliser une étude de caractérisation. Si celle-ci révèle des dépassements des valeurs limites réglementaires applicables, un avis de contamination devra être publié au registre foncier et un plan de réhabilitation devra être préparé, approuvé par le ministre et mis en œuvre.
Les obligations découlant d’un changement d’usage sont déclenchées dès qu’une « intention » de changer l’usage du terrain est présente. En ce qui concerne la notion de « changement d’utilisation », la LQE précise que le fait d’exercer sur le terrain une activité différente de celle qui était exercée antérieurement constitue un tel changement. Bref, cette notion est relativement vague, mais fait l’objet de certaines précisions dans les guides élaborées par le Ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques.
Il est à noter qu’il est désormais possible de procéder par le biais d’une déclaration de conformité, plutôt que par la procédure d’approbation du plan de réhabilitation par le ministre, lorsque la réhabilitation du terrain est effectuée uniquement par excavation des sols, que sa réalisation peut être complétée à l’intérieur d’un délai maximal d’un an et que la quantité de sols à excaver est d’au plus 10 000 m3. Un projet de réhabilitation qui rencontre les critères applicables pourrait donc éviter la lourdeur et les délais administratifs intrinsèques à la procédure d’approbation du plan de réhabilitation par le ministre.
Et les autres obligations?
Réhabilitation volontaire d’un terrain
La réhabilitation d’un terrain aux critères génériques ne nécessite en principe aucune approbation du ministre, sous réserve de certains cas particuliers.
Ainsi, une autorisation ministérielle en vertu de l’article 22 LQE pourrait être requise pour le recours à une technologie de réhabilitation qui est susceptible d’entraîner le rejet de contaminants dans l’atmosphère ou dans l’eau (traitement in situ).
De plus, une personne qui prévoit réhabiliter un terrain en laissant dans le sol des contaminants au-delà des valeurs limites applicables, soit en procédant par une réhabilitation par une évaluation des risques toxicologiques et écotoxicologiques, doit transmettre au ministre un plan de réhabilitation énonçant les mesures qui seront mises en œuvre notamment pour protéger la qualité de l’environnement et la santé et sécurité humaine. Suite à l’approbation du plan par le ministre, un avis de restriction d’utilisation devra être inscrit au registre foncier rendant ainsi le plan de réhabilitation opposable aux tiers et liant tout acquéreur subséquent aux charges et obligations prévues à celui-ci.
Avis au propriétaire voisin
La LQE prévoit aussi l’obligation pour le gardien d’un terrain d’aviser sans délai et par écrit le propriétaire d’un terrain voisin lorsque les trois conditions suivantes sont présentes:
- La contamination excède les valeurs limites réglementaires applicables;
- La contamination du sol provient de l’exercice sur le terrain d’une activité « désignée »; et
- Le gardien est informé de la présence des contaminants 1) aux limites du terrain ou 2) de l’existence d’un risque sérieux de migration hors du terrain susceptible de compromettre un usage de l’eau
Si seules les deux premières conditions sont présentes et que le gardien est informé d’un risque sérieux de migration de contaminants hors du terrain, seul le ministre doit alors être avisé.
Gestion des sols contaminés excavés
Enfin, même en l’absence d’une obligation statutaire quelconque de procéder à une caractérisation ou une réhabilitation du terrain, les projets de développement ou d’infrastructure requièrent généralement, que ce soit pour les fins du financement ou de la gestion des matériaux excavés, la réalisation d’études de caractérisation.
En ce qui concerne les sols contaminés excavés, soulignons que ceux-ci doivent être disposés dans un lieu autorisé à les recevoir. D’ailleurs, afin de contrer les cas de déversement illégal de sols contaminés, le gouvernement du Québec a publié au printemps un projet de règlement visant la traçabilité via GPS des mouvements de sols contaminés. L’utilisation d’un tel système de traçabilité fait déjà partie des conditions prévues aux appels d’offres de certains organismes publics. Le Règlement concernant la traçabilité des sols contaminés excavés fera l’objet d’un article distinct dès que la mouture finale de celui-ci sera publiée par le gouvernement du Québec.
Les obligations précitées applicables lors de la cessation d’activité ou d’un changement d’usage peuvent être aisément identifiées lors de la planification d’un projet par des recherches et vérifications appropriées. De plus, l’évaluation des volumes de sols contaminés à excaver dans le cadre d’un projet constitue souvent un élément clé au niveau du partage de risque entre le promoteur et l’entrepreneur général.
L’identification des risques environnementaux liés à la contamination du terrain en amont de tout projet d’infrastructure ou de développement permet de tenir compte des délais reliés à l’exécution de ces obligations dans l’échéancier du projet et, le cas échéant, de déterminer qui assumera les coûts et les risques liés à la décontamination du terrain ou à la gestion des sols excavés.
[1]Le présent article se veut un survol des principales obligations en la matière et ne tient pas compte de certaines exceptions qui pourraient être applicables à des cas d’espèce.
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