Sommaires exécutifs 1 juin 2021
Halston : l’homme qui a vendu son nom... et sa marque
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Une nouvelle minisérie est disponible sur la plateforme Netflix®, mettant en vedette Ewan McGregor qui incarne le créateur de mode Roy Halston Frowick. On y suit l’ascension d’Halston dans le milieu de la mode new-yorkaise à partir des années 60 jusqu’à sa mort en 1990. Entre son amitié avec la chanteuse et actrice Liza Minneli et sa rivalité avec son compétiteur Calvin Klein, un autre élément se révélera d’une importance capitale dans la vie du protagoniste : le droit des marques de commerce.
Alors qu’il débute sa carrière et dispose de peu de moyens financiers, un investisseur approche le couturier pour lui proposer un contrat qui semble, de prime abord, avantageux. Or, on apprendra plus tard dans la série qu’en signant ce contrat, Halston consent également à céder tous ses droits dans la marque de commerce HALSTON.
Halston et sa marque éponyme connaissent, dans les années qui suivent, un grand succès commercial. L’entreprise se met alors à commercialiser des produits de plus en plus diversifiés, des vêtements, bien sûr, mais aussi des parfums, des sacs, des lunettes, et même des tapis. Malgré ce succès ou à cause de celui-ci, Halston, l’individu, sombre dans l’enfer de la drogue et perd peu à peu son génie créatif. À un certain point, la relation entre ce dernier et ses cocontractants se détériore tellement qu’il doit se retirer de l’entreprise opérant sous la marque HALSTON.
C’est à ce moment que le protagoniste prend conscience de l’ampleur des conséquences du contrat qu’il a signé.
En cédant la marque HALSTON, l’homme du même nom a cédé son droit de commercialiser tout vêtement, de même que tout autre produit connexe, sous son propre nom. Il lui est donc impossible de repartir en affaires en employant son nom.
L’histoire se répète
Le créateur de mode Joseph Abboud a fait face à une situation similaire il y a environ 10 ans. L’histoire d’Abboud, contrairement à celle de Halston, a été judiciarisée. Dans cette affaire, le créateur avait cédé ses droits dans la marque JOSEPH ABBOUD, et avait ensuite entrepris de vendre des vêtements sous la marque JAZ. Il utilisait toutefois son nom dans la promotion de cette dernière marque, en la décrivant par exemple comme « a new composition by designer Joseph Abboud ».
En première instance, la Cour avait conclu que cet emploi constituait une violation au contrat de cession. Toutefois, en appel, cette décision a été renversée et l’affaire renvoyée en première instance. Finalement, la Cour a conclu que, puisque le contrat ne précisait pas que ce n’était pas permis, Abboud pouvait employer son nom, mais seulement sous certaines conditions. Cet emploi devait être descriptif, faire partie d’une phrase complète et être accompagné d’un avertissement aux consommateurs afin d’éviter toute confusion. De plus, le nom devait apparaître dans une police plus petite et être situé loin de la marque de commerce.
Les cas de cession de marques ayant eu de grandes répercussions sur leur propriétaire initial sont étonnamment nombreux et invitent à la réflexion, voire à la prudence. Il en va de même en matière de droits d’auteur.
Peut-on s’auto-plagier?
Les cas discutés plus haut ne sont pas sans rappeler celui de John Fogerty, chanteur et guitariste du légendaire groupe Creedance Clearwater Revival (CCR). Fogerty a composé et écrit la chanson « Run through the Jungle » parue sur un album de CCR en 1970 et dont les droits ont ensuite été acquis par la compagnie de disques. Une quinzaine d’années plus tard, Fogerty, dans le cadre de sa carrière solo, sort la chanson à succès « The Old Man Down the Road » dont la partition est essentiellement la même que celle de « Run through the Jungle » (cette qualification ne constitue pas une opinion juridique, mais plutôt l’opinion personnelle de l’amateur de rock classique qu’est le co-auteur du présent article).
Fogerty est donc poursuivi pour violation de droits d’auteur dans sa propre chanson. Aucune violation de droits d’auteur n’a toutefois été reconnue par la Cour dans cette affaire, mais il pertinent de souligner qu’il s’agissait d’un procès devant jury, ce qui n’existe pas au Canada en matière civile, et que Fogerty a possiblement bénéficié d’une certaine sympathie populaire. Peu importe l’issue de cette affaire, le fait demeure qu’un auteur peut contrefaire les droits d’auteur dans une œuvre qu’il a lui-même créée, mais par la suite cédés.
Les créateurs canadiens ne sont pas à l’abri de sorts semblables
Bien que la Loi sur les marques de commerce protège le droit d’un individu d’employer son propre nom comme nom commercial, celui-ci ne peut se faire si cet emploi est susceptible d’entraîner la diminution de la valeur de l’achalandage attaché à une marque de commerce enregistrée. De plus, ce droit ne s’étend pas à une société dont il est actionnaire. De son côté, la Loi sur le droit d’auteur ne prévoit aucune exception particulière en faveur d’un auteur lui permettant de reproduire une œuvre dont il est l’auteur, mais dans laquelle il ne détient plus les droits, incluant à des fins de promotion, dans son portfolio, par exemple.
Il est donc important de porter une attention particulière aux modalités du contrat de cession des droits qui peuvent permettre, ou non, l’emploi du nom ou d’une œuvre dans certaines situations particulières.
Leçon à tirer
Alors que la série à l’origine de cet article se termine sur la mention dramatique du fait que Halston est décédé avant d’avoir pu retrouver le droit d’employer son nom, un constat s’impose : si vous vous apprêtez à conclure une transaction incluant la cession de droits dans une marque de commerce ou de droits d’auteur qui vous tiennent à cœur, n’oubliez pas de consulter un spécialiste en la matière!
Pour plus de renseignements, n’hésitez pas à communiquer avec notre équipe de marques de commerce qui se fera un plaisir de répondre à vos besoins en matière de marques de commerce et de droits d’auteur au Canada, aux États-Unis ainsi qu’à l’international.
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