Sommaires exécutifs 11 mai 2023
La gestion des travailleurs étrangers : une nouvelle approche pour les spécialistes en ressources humaines
Par
Le vieillissement de la population, le nombre croissant de départs à la retraite, la pénurie de talent et le défi d’attraction et de rétention de la main-d’œuvre ont contribué à une modification du marché du travail.
Le recours aux travailleurs étrangers temporaires pour combler des postes de tout niveau, incluant à la fois les cadres, les professionnels, les spécialistes de haut niveau et les employés du secteur manufacturier apparait de plus en plus comme une solution incontournable. La maîtrise des concepts juridiques et des règles propres à la gestion de ces travailleurs devient une compétence essentielle pour les entreprises.
Le recours aux travailleurs étrangers temporaires nécessite une approche différente. Les entreprises doivent comprendre, non seulement les aspects légaux reliés à l’immigration des travailleurs, mais également les particularités du droit de l’emploi applicable, et ce avant, pendant et après la durée de l’emploi du travailleur étranger.
Considérations importantes avant l’embauche
De manière générale, tout travail exécuté au Canada par un travailleur étranger requiert un permis de travail, et ce, peu importe la durée du contrat et la source de rémunération. Le processus d’immigration varie substantiellement en fonction de facteurs incluant notamment le type d’emploi, le salaire offert, l’expérience et l’éducation du candidat ainsi que sa citoyenneté. Les délais pour la préparation et le traitement de telles demandes peuvent varier grandement entre quelques jours et plusieurs mois. Une stratégie d’immigration agile doit tenir compte de ces facteurs et les attentes doivent être gérées adéquatement. La rédaction des offres d’emploi doit inclure certaines clauses de protection en cas de refus des demandes de permis de travail, de désistement du candidat, de changements de circonstances pour l’employeur et autres risques afférents.
Il est également important de bien comprendre les enjeux d’une demande de permis de travail. Dans certaines situations il est exigé de l’employeur de faire la preuve que malgré des efforts importants, aucun candidat canadien ou résident permanent qualifié et disponible n’a pu être identifié pour le poste à combler. Les règles relatives aux affichages de postes diffèrent largement des pratiques traditionnelles et il est crucial de bien identifier les enjeux à ce niveau. Il faut également s’assurer que le salaire offert au travailleur étranger correspond au salaire médian tel que défini par Emploi Québec ou Service Canada, et ce, sans égard à l’échelle salariale interne sauf s’il s’agit de postes syndiqués. L’iniquité salariale pourrait être soulevée dans certaines situations.
D’autre part, parmi les obligations des employeurs qui ont recours aux travailleurs étrangers figurent certaines obligations financières qui varient selon les situations et qui peuvent inclure les frais de transport, les frais reliés à l’obtention d’assurances-santé temporaires, une assistance à l’accès au logement abordable. Des dispositions récentes ont ajouté l’obligation de remettre au travailleur étranger temporaire un contrat de travail écrit avant son arrivée au Canada. L’utilisation d’un contrat type qui ne tient aucunement compte des réalités particulières reliées à l’embauche d’un travailleur étranger est une erreur fréquente. En sus des commentaires ci-avant concernant le caractère conditionnel des offres, les employeurs peuvent prévoir des clauses de remboursement pour certains frais engagés pour l’arrivée des travailleurs en cas de désistement ou de départ hâtif. Toutefois, la Loi et ses règlements prévoient plusieurs exclusions et interdisent à l’employeur une telle pratique pour une partie des frais déboursés ou la totalité selon chaque cas. Des conseils avisés pour chaque cas particulier sont nécessaires. Ces coûts doivent faire partie des éléments à prévoir dans le contexte du recrutement international.
Considérations importantes pendant la durée de l’emploi
Bien qu’il existe certains permis de travail « dits ouverts » qui permettent une grande latitude, la plupart des permis de travail sont dits fermés ce qui entraîne plusieurs obligations de conformité pour les employeurs visés. Pour toute la durée du permis de travail ou de l’emploi, l’employeur doit fournir au travailleur étranger temporaire un emploi dans la même profession que celle indiquée dans la demande, lui verser un salaire qui est essentiellement le même, et non moins avantageux, lui fournir des conditions de travail qui sont également essentiellement les mêmes et non moins avantageuses, mettre en place les mesures nécessaires pour offrir un milieu de travail exempt d’abus de toute sorte et respecter les autres engagements pris le cas échéant. Tout changement de poste incluant une promotion, tout changement aux conditions de travail par exemple un changement d’unité d’affaires au sein d’un groupe ou toute autre modification aux conditions d’emploi nécessitent une analyse poussée afin de déterminer si un nouveau permis de travail est requis. Le cas échéant, ce dernier doit être obtenu avant que les changements soient effectifs. Les spécialistes des ressources humaines doivent mettre en place des systèmes de suivi et de gestion afin de s’assurer que de tels changements ne soient pas faits sans autorisation valable. Le caractère restrictif des permis de travail peut également soulever plusieurs questions d’équité ou d’opportunités égales. Il est crucial de prendre en considération autant les aspects du droit de l’emploi que ceux du droit de l’immigration et le mariage est parfois difficile à faire.
Considérations importantes à la fin de l’emploi
Contrairement à certaines croyances populaires, un travailleur étranger temporaire n’est pas tenu de demeurer à l’emploi de l’employeur qui a facilité son arrivée au Canada. Bien que les permis de travail fermés ne permettent pas de travailler pour un autre employeur, il est tout à fait possible de débuter une nouvelle démarche et d’obtenir un permis de travail pour un autre employeur à tout moment. De la même manière, un employeur peut mettre fin à l’emploi pour les mêmes motifs et sous les mêmes régimes de protection applicables aux résidents permanents et citoyens canadiens. Toutefois, dans certains cas les frais de transport pour le retour dans le pays d’origine doivent être payés par l’employeur. Il s’agit encore là d’une analyse à faire pour chaque situation de manière individuelle. Les employeurs utilisateurs du système doivent également conserver les dossiers des travailleurs étrangers pour une période de six (6) années en cas d’audit ou d’inspection. Les conséquences d’une enfreinte aux règles, même si l’emploi du travailleur visé par une enquête est terminé peuvent inclure notamment des pénalités financières, la révocation d’autres permis de travail émis pour l’employeur et peuvent aller jusqu’à l’incapacité pour cet employeur de recourir à certains programmes pour l’obtention de permis de travail.
Conclusion
Le recours aux travailleurs étrangers temporaires peut devenir un avantage important pour une entreprise. Toutefois, il est nécessaire de bien comprendre les enjeux et de travailler avec des experts qui maîtrisent les concepts juridiques et les règles d’immigration et du droit de l’emploi applicables. Les entreprises doivent changer leur approche pour adopter des pratiques adaptées et s’outiller des outils nécessaires pour une gestion efficace de cette nouvelle réalité.
Pour toute question, n’hésitez pas à communiquer avec notre associée avocate et chef de l’équipe immigration d’affaires Julie Lessard, qui se fera un plaisir de vous aider.
Vous souhaitez en apprendre davantage?
Participez à notre forum stratégique sur les nouvelles réalités du monde de travail qui se tiendra le 16 mai de 8 h 30 à 13 h à notre bureau de Montréal.