Sommaires exécutifs 8 déc. 2021
Hauts dirigeants d’entreprise, écoutez votre département RH et mobilité pour faire face à la pénurie de main-d’œuvre
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Dans le contexte actuel de recrutement de talents et de ressources à l’échelle mondiale, le Canada cherche à adapter et à moderniser son processus d’immigration afin de continuer à être un chef de file en matière de recrutement de travailleurs étrangers.
Un rapport de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) publié peu de temps avant la pandémie affirmait que le système d’immigration économique du Canada figurait parmi les plus performants au monde. Or, la course aux travailleurs étrangers est féroce et de nombreux postes restent à pourvoir dans plusieurs industries et dans divers secteurs de l’économie à travers le pays, y compris au Québec. Quoi qu’il en soit, le Québec se distingue par son programme d’immigration moderne démontrant que les entreprises bien informées et agiles peuvent assumer un rôle non seulement actif, mais également crucial dans le processus de sélection des immigrants. La plupart des entreprises ignorent toutefois à quel point leur rôle est décisif.
Le rôle crucial des entreprises dans l’immigration au Québec et au Canada
Les directeurs généraux et financiers d’entreprises ne peuvent ignorer les répercussions des politiques d’immigration ou de leurs modifications sur leurs activités et leurs résultats financiers. Il suffit de regarder chez notre voisin du sud pour constater à quel point les entreprises et les organismes américains sont sensibilisés et impliqués dans le processus d’immigration, illustrant ainsi l’importance de bien maîtriser ce processus. Dans leurs déclarations 10-K, des géants comme Microsoft mettent en évidence les risques engendrés par la politique d’immigration et ceux-ci sont clairement identifiés et communiqués : « Notre entreprise dépend de notre capacité à recruter et à garder des travailleurs compétents. (...) Nous sommes également restreints dans notre capacité à recruter au niveau international en raison de lois nationales contraignantes en matière d’immigration. Des modifications apportées aux politiques d’immigration américaines visant à réduire la quantité de main-d’œuvre technique et professionnelle risquent d’entraver notre capacité à recruter le personnel adéquat pour nos activités de recherche et de développement » (United States Securities and Exchange Commission). Nous observons également des organisations influentes, comme la Chambre de commerce des États-Unis, qui contestent sans cesse les politiques visant à limiter les chances de recrutement de travailleurs étrangers par des employeurs américains ou ayant une incidence importante sur les salaires que ceux-ci pourraient percevoir. Les plus récentes contestations liées aux salaires en vigueur et aux quotas basés sur les salaires du programme H-1B ont été couronnées de succès tandis que les trois mesures annoncées par l’administration Trump, qui auraient considérablement affecté la capacité des entreprises à recruter des travailleurs qualifiés dans le cadre de ce programme, ont été abandonnées ou annulées. (Forbes)
La pandémie a fait ressortir une autre facette des risques associés à une main-d’œuvre mondiale, celle des restrictions de voyage, une perspective désormais bien réelle. Les restrictions mises en place après l’apparition de la COVID-19 ont soudainement fait en sorte que plusieurs dizaines de milliers de travailleurs étrangers n’ont pas pu regagner les États-Unis pour reprendre leur emploi auprès d’employeurs américains. Les interdictions de voyager ont aussi considérablement réduit les chances de recruter de nouveaux talents, privant ainsi les employeurs américains de centaines de milliers de travailleurs. Certes, les entreprises ont su innover en proposant des solutions de télétravail international, mais certains aspects complexes comme les lois sur le travail, les obligations fiscales internationales applicables aux employeurs et aux employés, les retenues à la source et la gestion des lieux de travail des employés ont soulevé de nombreuses questions quant à leur conformité.
Si l’histoire de l’immigration au Canada est plus récente et moins impressionnante en matière de chiffres, elle joue néanmoins un rôle important dans notre économie. Au Québec, les risques liés à la politique d’immigration et aux changements qui y sont apportés sont considérables pour la majorité des entreprises touchées par la pénurie de main-d’œuvre, surtout celles dont les connaissances ou les ressources ne leur permettent pas de tirer efficacement parti de notre système d’immigration. Ainsi, selon les plus récentes études, le Québec devra pourvoir près de 1 500 000 emplois d’ici 2026, et ce, alors que le taux de chômage avoisine le plein emploi (Ministère du Travail, de l’Emploi et de la solidarité sociale). Bien que les travailleurs sans emploi, les jeunes et d’autres groupes de la population joueront un rôle important, on prévoit qu’environ 22 % des postes à pourvoir le seront par des immigrants, qu’ils soient qualifiés ou non (Ministère du Travail, de l’Emploi et de la solidarité sociale). Il faut donc que les entreprises soient proactives et puissent trouver une façon de participer au processus de sélection des futurs immigrants de façon à ce que leurs besoins spécifiques au niveau de la main-d’œuvre soient pris en compte. Les entreprises québécoises ne peuvent pas, sous le régime d’immigration actuel, attendre l’arrivée des immigrants aussi passivement que par le passé. Elles doivent au contraire être prévoyantes et mettre sur pied et implanter des stratégies d’immigration compétitives. On ne peut plus penser que l’immigration n’est qu’une simple question tactique de ressources humaines - celle-ci doit être traitée comme un enjeu stratégique et comme un élément essentiel permettant aux entreprises de rester compétitives sur le marché international des talents.
Au cours de la dernière décennie, l’immigration au Canada, et plus particulièrement au Québec, a énormément progressé. De nos jours, une grande partie des immigrants permanents provient du bassin de travailleurs étrangers qui vivent déjà au Canada et qui détiennent un permis de travail temporaire. En 2019, soit tout juste avant la pandémie, le Canada a délivré environ 470 000 permis de travail temporaires, un bond considérable comparativement aux 340 000 et 390 000 permis délivrés respectivement en 2017 et 2018 (Statistique Canada). Pour la majorité des demandes de permis de travail, l’employeur doit être impliqué et doit appuyer cette demande. De plus, une grande partie de ces permis de travail seront délivrés pour un poste précis auprès d’un employeur précis. Ces permis de travail ne sont pas interchangeables à moins que de nouvelles demandes de permis de travail soient soumises et approuvées. Autrement dit, les employeurs ne participant pas de manière proactive dès les premières étapes de la demande de permis de travail ont moins de chances de tirer profit de l’arrivée d’immigrants, tant sur une base temporaire que sur une base permanente.
Les différentes voies vers l’immigration au Québec
En ce qui concerne le système québécois, la province choisit elle-même ses immigrants permanents selon un accord de longue date avec le gouvernement fédéral. Le processus de sélection actuellement en vigueur se base sur ces mêmes principes fondamentaux : favoriser les travailleurs étrangers déjà installés et travaillant dans la province. Essentiellement, hormis les investisseurs, les entrepreneurs et les travailleurs autonomes qui ne constituent qu’une petite partie des immigrants permanents, le volet de l’immigration économique est constitué principalement de travailleurs qualifiés admis au titre de la catégorie Expérience québécoise ou de la catégorie Travailleurs qualifiés. Ces deux systèmes accordent une importance stratégique à la présence physique et à l’expérience professionnelle au Québec, comme nous le verrons brièvement ci-après.
Les principaux critères de sélection dans la catégorie Expérience québécoise sont que les candidats résident au Québec au moment de la demande, qu’ils détiennent un permis de travail valide et qu’ils aient accumulé au moins deux ans d’expérience locale dans des professions classées O, A ou B dans la Classification nationale des professions (la "CNP"). Une connaissance avancée du français est également requise. En raison de ces critères, de nombreux postes techniques et emplois peu spécialisés sont exclus, alors que les données statistiques révèlent que, d’ici 2028, près de 34 % de l’ensemble des emplois au Québec seront encore occupés par ces métiers. (Statistique Canada) Considérant que cette catégorie n’est ouverte qu’aux détenteurs de permis de travail, les entreprises ayant appuyé ce processus sont en meilleure position pour profiter non seulement de la présence de travailleurs étrangers temporaires, dans un premier temps, mais aussi pour les garder, à condition que des mesures de rétention aient été mises en place de manière efficace.
Pour les travailleurs qualifiés qui souhaitent immigrer au Québec, une seconde voie s’offre à eux : la catégorie des travailleurs qualifiés. Les demandes doivent être soumises par le biais de la plateforme Arrima, qui consiste essentiellement en un système de déclaration d’intérêt par lequel les candidats soumettent leur candidature puis attendent de recevoir une invitation à déposer leur demande de résidence permanente. Si les critères pour se qualifier sont définis et comprennent notamment l’âge, la scolarité, les connaissances linguistiques, l’expérience professionnelle et les compétences, ceux pour être conviés sont plus imprévisibles et varient d’une sélection à l’autre. À ce jour, quatre tours de sélection ont eu lieu, et pour chacun d’entre eux de nouveaux critères ont été définis, comme le fait de travailler dans certaines professions, de travailler à l'extérieur du Grand Montréal et de bénéficier d’une offre d’emploi permanent garanti. Notons que malgré les promesses du gouvernement d’inclure les professions visées par la CNP, aucune des sélections n’a ouvert la porte aux travailleurs étrangers exerçant ces professions. Toutefois, cette situation pourrait changer en raison des annonces récentes. Ces changements sont souhaités et nécessaires si ces travailleurs sont exclus de la catégorie Expérience québécoise. Autre élément important à souligner : encore une fois, l’implication des employeurs joue un rôle essentiel dans le processus d’invitation. En effet, tous les candidats sélectionnés ont bénéficié d’une offre d’emploi permanent garanti. Pour faire reconnaître une telle offre, l’employeur doit déposer une demande, augmentant ainsi les chances des travailleurs étrangers embauchés sur son lieu de travail d’être choisis.
Nous observons indubitablement une tendance selon laquelle les entreprises appuyant leurs travailleurs étrangers dans leurs démarches de demande d’emploi permanent seront plus compétitives dans leur capacité à attirer et à garder les talents. Les travailleurs étrangers sont en quête d’employeurs disposés à les aider adéquatement afin qu’ils puissent se qualifier ou être invités en priorité. De toute évidence, une telle implication et un tel soutien constituent des facteurs significatifs pour les travailleurs étrangers à la recherche d’emplois. Les employeurs ont non seulement une influence sur les personnes qui pourront entrer au pays dans un premier temps grâce à un permis de travail temporaire, mais aussi sur celles qui pourront rester en tant que résidents permanents par la suite.
Dans un tel contexte, alors que la loi applicable confère un grand pouvoir aux employeurs, les entreprises doivent plus que jamais se distinguer par la mise en place et le déploiement de stratégies d’immigration efficaces. Des organismes québécois influents comme le Conseil du patronat du Québec et l’Alliance des Manufacturiers et Exportateurs du Québec multiplient leurs efforts pour faire valoir les intérêts de leurs membres avant que le gouvernement provincial ne modifie ses politiques. Nul ne conteste l’importance du rôle que peuvent jouer les employeurs québécois. Les entreprises québécoises doivent évoluer pour ne plus voir l’immigration comme une question purement tactique, mais plutôt comme un moyen stratégique de développement de leurs affaires. Elles doivent également se perfectionner dans l’analyse et la gestion des risques associés à une main-d’œuvre mondiale.
Les employeurs québécois ont la possibilité de contribuer activement au développement de la main-d’œuvre de demain. Reste à savoir s’ils sont conscients du pouvoir qu’ils ont ou encore s’ils ont la connaissance des règles et la compétence institutionnelle pour en profiter pleinement. Pour les directeurs généraux et financiers, le moment est venu de s’asseoir avec leurs spécialistes des ressources humaines et de la mobilité afin de repenser la façon dont ils perçoivent l’immigration.
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