Sommaires exécutifs 28 oct. 2024

Ce que doivent finalement retenir les propriétaires de marques de commerce au sujet des modifications récentes apportées à la Charte de la langue française (Loi 96)

Le 26 juin 2024, le gouvernement du Québec a publié la version finale du Règlement modifiant principalement le Règlement sur la langue du commerce et des affaires, en prévision des nouvelles dispositions de la Charte de la langue française portant sur l’affichage et l’emballage et qui doivent entrer en vigueur le 1er juin 2025, suite à l’adoption du projet de Loi 96.  

Avant l’adoption de ce projet de loi, la Charte exigeait déjà que toute inscription sur un produit (dont son emballage) et dans l’affichage commercial au Québec soit en français. Le Règlement sur la langue du commerce et des affaires (le « Règlement ») prévoyait des exceptions à cette règle, dont celle relative aux marques de commerce, et permettait l’inscription dans une langue autre que le français d’une « marque reconnue » au sens de la Loi sur les marques de commerce (« LMC »).  
 
À l’époque, malgré la position adoptée par l’Office québécois de la langue française d’interpréter restrictivement l’expression « marque reconnue » pour limiter l’application de cette exception aux marques dûment enregistrées seulement, cette expression a été interprétée plus largement par les tribunaux qui ont tranché que l’exception s’étend à toutes les marques, enregistrées ou non (pourvu qu’il s’agisse véritablement d’un emploi à titre de marque de commerce). 

Le texte de la Loi 96 modifie la Charte pour restreindre la portée de cette exception aux seules marques dûment enregistrées, ce qui a suscité un tollé au sein d’une grande partie de la communauté des affaires, tant au Québec qu’à l’extérieur.  
 
Notons d’abord que l’obtention d’un enregistrement de marque au Canada nécessite généralement deux à trois ans d’attente dans le meilleur des cas. Pour atténuer la rigidité de cette modification législative mal reçue, une version antérieure du projet de Règlement assimilait la demande d’enregistrement de marque en instance à une marque enregistrée. Mais cet assouplissement proposé demeurait problématique pour bien des entreprises dont les marques ne sont pas enregistrables (pour diverses raisons) et considérant que les coûts nécessaires pour enregistrer une marque (et à plus forte raison pour en enregistrer plusieurs) constituent un obstacle pour les plus petites entreprises ou celles dont la présence au Québec est plus limitée. 

De manière tout à fait surprenante, la plus récente version du Règlement publiée le 26 juin 2024 rétablit l’exception de la « marque reconnue » pour les inscriptions dans une langue autre que le français sur les produits et affichages, permettant ainsi à une marque, qu’elle soit enregistrée ou non, de bénéficier de l’exception.  
 

En d’autres termes, le Règlement annule complètement une modification importante apportée à la Charte et établit de nouveaux paramètres applicables à cette exception.  

Voici donc un résumé des nouvelles règles applicables au Québec à partir du 1er juin 2025 en ce qui concerne l’exception permettant d’inscrire une marque de commerce uniquement dans une autre langue que le français : 

  • Produits, emballages et documents d’accompagnement : Toute marque de commerce reconnue au sens de la LMC (enregistrée ou non) pourra y être inscrite dans une langue autre que le français sans autre considération ou exigence. Cependant, si la marque de commerce, qui est dans une langue autre que le français, inclut des éléments génériques ou descriptifs (tels que les ingrédients, la couleur, le parfum ou d’autres caractéristiques du produit), une version française des éléments génériques ou descriptifs doit aussi apparaître. 
  • Affichage commercial : L’affichage visible de l’extérieur (incluant par le travers des vitrines d’un commerce) doit inclure des termes en français, tels qu’un générique, un descriptif ou un slogan. De plus, l’espace dédié aux textes français doit être au moins deux fois plus grand que celui occupé par la marque de commerce ou par tout autre texte non français. 
  • Documents commerciaux disponibles au public, tels que des catalogues, des brochures, des dépliants, des annuaires et des bons de commande : La règle en vigueur avant l’adoption du projet de Loi 96 demeure essentiellement inchangée : une marque de commerce reconnue au sens de la LMC (qu’elle soit enregistrée ou non) n’a pas à être traduite pour apparaître sur ces documents et n’a pas à être contrebalancée par une présence additionnelle de texte en français.

Nous portons à votre attention que pour pouvoir inscrire votre marque uniquement dans une langue autre que le français sur des produits, emballages, documents d’accompagnement, affichages publics au Québec ou documents commerciaux disponibles au public, aucune version française de cette marque ne doit se trouver au sein du registre des marques de commerce. Dans le cas contraire, la version française devra obligatoirement apparaître sur ces inscriptions et affichages. 

Bien que la version finale du Règlement étende l’exception aux marques non enregistrées, il est vivement recommandé de procéder à l’enregistrement puisque cela facilitera considérablement la preuve, si nécessaire, que votre marque bénéficie de l’exception en vertu du Règlement.  

Notre équipe de professionnels en marques de commerce se tient à votre disposition pour vous accompagner dans ce processus et vous aiguiller en matière de stratégie de protection de vos marques au Canada et à l’international.