Sommaires exécutifs 17 mars 2020
COVID-19: mesures contractuelles et pratiques à prendre
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Au début février dernier, nous abordions dans un article certaines des répercussions que la crise entourant le Coronavirus, sévissant alors majoritairement en Asie, pourrait prévisiblement avoir sur les entreprises canadiennes.
Nous soulevions alors, à ce moment, des mesures à prendre par ces entreprises pour limiter l’impact de la crise sur leurs affaires, notamment en invoquant la force majeure auprès de leurs clients.
Aujourd’hui, l’Organisation mondiale de la Santé qualifie de pandémie la situation entourant le Coronavirus. Puisque les effets de ce virus, dorénavant désigné comme la COVID-19, se font bien sentir au pays, il est rendu évident que celui-ci aura un impact considérable sur les opérations commerciales des entreprises canadiennes et que celles-ci devront prendre des mesures supplémentaires pour répondre à ces répercussions.
Il est à présager que les impacts de la COVID-19 prendront plusieurs formes, dont les suivantes :
- fermetures d’usines et ralentissement de la production;
- fermetures de commerces et absence de clientèle;
- fermetures des frontières et limites aux importations et exportations;
- augmentation des prix de certains biens en raison de leur rareté;
- annulation de commandes par des clients;
- augmentation des délais de paiement;
- diminution de la main-d'œuvre disponible en raison de la maladie ou de l'isolement ;
- impossibilité de tenir certaines réunions, dont les assemblées annuelles d’actionnaires, dans les délais requis par la loi.
En tant qu’entreprise, vous devrez jongler avec ces enjeux, tout en tentant de maintenir votre profitabilité et de rencontrer vos propres obligations à l’égard de vos employés, clients, fournisseurs, actionnaires, investisseurs et banquiers, sans oublier le gouvernement et les autorités fiscales. Nous vous référons à l’article pour les aspects de droit de l’emploi liés à la COVID-19.
Tel qu’il en fut question dans notre article précédent, tout porte à croire que la survenance de la COVID-19 et ses impacts sur les opérations des entreprises remplissent les conditions d’application de la force majeure qui sont, lorsque définit par le Code civil du Québec, les éléments d’imprévisibilité, d’irrésistibilité et d’extériorité. Bien que la pandémie en cours satisfasse à priori les deux derniers critères, il pourrait être difficile d’invoquer que ses effets n’étaient pas prévisibles pour les contrats récemment conclus ou en cours de négociation.
Sur les plans commercial et contractuel, afin de bien cibler les actions à entreprendre quant à la modulation des obligations prévues à vos contrats, certaines mesures s’imposent :
1. Sortez vos contrats en cours, identifiez les obligations en jeu, les délais à respecter, les pénalités, les dommages éventuels en cas de retard et prenez soin d’identifier les clauses de force majeure. Le Code civil du Québec définit cette notion et son application, mais le contrat peut en modifier la définition ou en modifier les conséquences. Par exemple, il est coutume de mentionner que la force majeure n’excuse pas des délais de paiement. On doit savoir que la définition du Code civil du Québec ne sera pertinente qu’en cas de silence du contrat et ne trouvera pas application aux contrats régis par des lois étrangères.
2. Pour tout contrat en cours de négociation, identifiez clairement les éléments qui pourraient être impactés par la pandémie et assurez-vous de ne pas renoncer à la possibilité d’invoquer la force majeure avec l’évolution de la situation. Une mention expresse de la situation entourant la COVID-19 au contrat à être conclu ainsi que l’ajout de réserves quant à l’accomplissement des obligations qui pourraient être affectées par celui-ci serait également des pratiques prudentes dans la présente situation d’incertitude. Tel que mentionné précédemment, la date de conclusion du contrat est un élément important qui aura nécessairement une influence sur la possibilité d’invoquer la force majeure en guise d’explication à une inexécution contractuelle en raison du caractère plus ou moins imprévisible des effets de la pandémie.
3. Vous avez une obligation de « mitiger » vos dommages en vertu de la loi. Avisez vos clients, tenez-les au courant des mesures que vous prenez. Ne prenez pas pour acquis que la pandémie excusera tout retard, il faudra prouver que ceux-ci sont bel et bien causés par des circonstances hors de votre contrôle, et non par vos décisions d’affaires ou personnelles, aussi louables soient-elles. Documentez bien vos décisions et les faits en cause. Par exemple : Qui travaillait sur le livrable? Quand cette personne a-t-elle cessé de travailler? Pour quelle(s) raison(s)? À quel moment les mesures sanitaires ont-elles été imposées? Était-il possible de travailler à distance?, etc.
4. Sortez aussi les contrats avec vos fournisseurs. Assurez-vous qu’ils respectent les termes de leurs contrats et qu’ils justifient leurs retards, le cas échéant. Assurez-vous aussi qu’ils n’abusent pas de la situation et respectent les prix convenus alors qu’il est possible que certains tenteront d’augmenter leurs prix ou de moduler différemment leurs obligations. Pour les délais de transport, plusieurs conventions internationales peuvent s’appliquer et sont généralement mentionnées dans les bons de connaissement. Des limites s’appliquent toutefois et vos réclamations doivent être déposées dans des délais spécifiques.
5. Vérifiez vos contrats d’assurance et parlez à votre institution financière. Tenez-vous au courant des mesures de soutien. Par exemple, la Banque de développement du Canada offre actuellement un prêt accessible rapidement et à distance, avec un minimum d’information d’un montant entre 10 000 $ et 100 000 $ pour soutenir les entreprises affectées par la pandémie. D’autres mesures suivront sans aucun doute.
6. Tenez vos actionnaires, investisseurs, banquiers et assureurs informés. En cette période de turbulence, ils seront de précieux alliés.
Les entreprises ne devraient pas attendre la fin de la crise, et encore moins que les problèmes surgissent avant de prendre les mesures nécessaires pour protéger leur entreprise. Il en va de leur viabilité financière, mais aussi de leur responsabilité envers leurs employés, leurs investisseurs et autres parties prenantes.
Pour en apprendre davantage sur les enjeux contractuels liés à la pandémie de la COVID-19, n'hésitez pas à communiquer avec notre équipe en Droit des affaires.
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